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Résumé de congrès | 28 mai 2021

Événement Les Affaires sur l’excellence opérationnelle manufacturière, première édition

Le 18 février 2020, en plus d’y donner une conférence, le Mouvement a agi à titre de maître de cérémonie à la première édition de l’événement Les Affaires portant sur l’excellence opérationnelle manufacturière. Difficile de trouver un sujet plus intimement relié à la mission du Mouvement! Voici un résumé de cette journée riche en contenus.

Mot d’ouverture : la quête médiévale d’un idéal grandiose

Marco Poutré
Conseiller qualité – Mouvement québécois de la qualité

En guise de mot d’ouverture, notre collègue Marco Poutré a dressé un parallèle entre les praticiens en excellence opérationnelle et les chevaliers du temps du Moyen-Âge. Vous pouvez lire l’essentiel de cette comparaison dans un article qu’il a publié sur LinkedIn.

Standardisez vos processus, documentez-les, consolidez-les et gardez-les pérennes

Jean-François Cantin
Vice-président – SBI International

Depuis l’achat d’une participation majoritaire dans l’entreprise Drolet Poêles et Foyers avec son frère en 1999, Jean-François Cantin a vu son organisation passer de 40 employés et 5,5 M$ de chiffre d’affaires à 200 employés et 50 M$. Une telle croissance, ponctuée de neuf acquisitions, a mis une sérieuse pression sur la façon de faire les choses. On ne peut plus se fier uniquement à ce qui se trouve dans la tête des gens. Initialement basée sur un processus somme toute très simple, la réalité de ce qui est devenu SBI International s’est transformée en un amalgame complexe de marques et d’exceptions.

Les processus comme points d’ancrage

Dans cette tourmente, M. Cantin a eu la sagesse d’utiliser les processus comme points d’ancrage. Il est d’abord revenu à la base.

  • Nous existons grâce à nos clients.
  • Nos clients achètent nos produits parce qu’ils y perçoivent de la valeur.
  • Un processus est un groupe d’activités interreliées dont le but est de générer un résultat ayant de la valeur pour le client (définition du Dr Michael Hammer).
  • Le bon processus donne les bons résultats.
  • Un processus organisé et défini est contrôlable et répétable. Si chaque fois que vous lancez un intrant dans un processus, vous avez peur de ce qui va sortir au bout, posez-vous des questions!

Un processus est une organisation en soi

Chaque processus doit être perçu par les gens qui y travaillent comme une organisation en soi. Comment définirions-nous le processus si des clients externes nous payaient pour en recevoir les extrants? Autrement dit, si ses extrants étaient la raison d’être et la principale source de revenus de l’organisation ? Voilà qui change le point de vue !

L’équipe R et D fut citée en exemple. Avant, le transfert des produits de la R et D à la fabrication se faisait pour le moins cavalièrement. Une fois que le flambeau avait été passé, c’était à la fabrication de se débrouiller avec les inévitables problèmes inhérents à un nouveau produit. Aurait-on cette attitude si cette même équipe de fabrication payait pour ce service? Maintenant, l’équipe R et D assure un soutien actif pendant une période de trois mois lors du lancement d’un nouveau produit. N’est-ce pas ce que ferait toute organisation dont la mission est de développer de nouveaux modèles d’appareils de chauffage pour des clients externes?

Des processus clairs pour que l’humain s’y retrouve

M. Cantin prône aussi de s’attarder sur les activités d’abord, et seulement ensuite sur les humains. Notre empathie nous pousse souvent à faire l’inverse. Par exemple, nous tentons désespérément de comprendre pourquoi l’humain a fait une erreur, mais celui-ci comprend-il la place de son travail dans le processus? Il devient beaucoup plus facile d’identifier les rôles de chacun et les compétences requises une fois que les processus sont clairs. Tant qu’ils sont flous, les gens vont y naviguer du mieux qu’ils peuvent, certaines tâches seront faites en double alors que d’autres seront oubliées, etc.

M. Cantin est aujourd’hui le gardien de tous les processus de son organisation. Il s’est distancé intentionnellement de la réalité opérationnelle et de l’ingérence typique dans le quotidien pour veiller plutôt au bon fonctionnement des processus. Une leçon inspirante sur le rôle que devrait jouer un dirigeant!

Transformez la gestion d’équipes d’expertises en leadership dynamique, performant et innovant

Gérard B. Lachance
Chef de performance et qualité de la division ingénierie, service des grands projets – Hydro-Québec Innovation, équipement et services partagés

Anick Tremblay
Directrice principale, Expertise – Hydro-Québec Innovation, équipement et services partagés

Hydro-Québec est certainement un modèle de la dynamique de communication sous-jacente à un système de gestion au quotidien. Leur chaîne de réunions quotidiennes, qui s’assure de véhiculer les enjeux pertinents du bas vers le haut, a été déployée… du haut vers le bas!

Une « Courroie de transmission humaine »

En effet, tout a commencé par des rencontres entre l’ex-PDG Éric Martel et ses employés. Une fois cette routine installée, ce fut au tour des employés d’Éric Martel d’animer à leur tour une rencontre quotidienne avec leurs employés. Et ainsi de suite jusqu’au niveau des superviseurs.
Avant de passer à l’étape suivante du déploiement, il faut s’assurer que l’adhésion des gens au niveau actuel est complète. Cela permet à la fois un déploiement progressif (le nombre d’employés impliqués augmente de manière appréciable à chaque nouveau palier) et logique (les gestionnaires de la haute direction adhèrent plus naturellement à la vision de l’entreprise).

Une telle séquence renforce également la standardisation de la démarche. En effet, lorsque le moment est venu pour un employé de porter le chapeau d’animateur pour sa propre équipe, il peut se baser sur les nombreuses rencontres auxquelles il a assisté pendant des semaines. Grâce à cette « courroie de transmission humaine », un problème sur un barrage à Sept-Îles discuté lors de la rencontre matinale d’une équipe opérationnelle fera son chemin aussi haut que nécessaire, possiblement jusqu’au sommet de la hiérarchie. C’est vrai dans beaucoup d’organisations, mais à grands coups de courriels urgents ou d’appels de panique! Dans le cas d’Hydro-Québec, cela se fait au moyen de la routine en place.

Lors des rencontres, les six piliers stratégiques identifiés par Hydro-Québec sont éventuellement passés en revue. Notons au passage la manière rassembleuse dont est rédigé le visuel résumant ces six piliers : « Ensemble, prévenons les accidents », « Ensemble, nous réinventons le futur du client », etc. Une belle façon d’insister sur le fait que chaque pilier est l’affaire de tous et non la responsabilité de certains départements.

Les conférenciers ont mentionné au passage que certains superviseurs ont quitté Hydro-Québec lors du déploiement parce que l’animation de telles rencontres ne convenait pas à leur style de gestion. Quand on veut changer la culture, il vaut probablement mieux payer ce prix que de faire des exceptions!

La gestion du changement : la clé du succès

Robert Verreault
Directeur général – Bridgestone, usine de Joliette

Voici quelques perles issues de cette conférence.

À l’usine de Joliette, personne n’a le droit de parler d’un problème sans d’abord être allé sur le terrain pour voir de quoi il en retourne. Voilà qui évite beaucoup de conversations entre gestionnaires du style « mon employé m’a dit que ton employé… ». C’est un pas de plus vers la philosophie gemba.

Les trois étapes simples de l’amélioration continue

  1. Dès le départ, mesurer la performance réelle et naturelle de chaque opération. Savoir d’où on part, sans aucun biais et sans se fier sur des perceptions.
  2. Définir un standard et l’atteindre dans toutes les situations (chaque opérateur, chaque quart de travail, etc.). Prendre le meilleur de ce qu’on a vu et en faire la norme, quelque chose que nous pourrons répéter facilement avec les moyens à notre disposition.
  3. Définir la cible d’amélioration et y travailler. Faire de petits pas structurés vers l’excellence.

Un haut dirigeant japonais de Bridgestone, au terme de sa visite de l’usine de Joliette, a dit : « je suis impressionné par la profondeur technique des questions posées par vos opérateurs ». Voilà comment on peut se démarquer quand on est une parmi 50 usines d’un groupe industriel.

Dans ce contexte, la compétition interne est presque aussi féroce que la compétition externe alors que chaque site joue du coude pour décrocher les mandats de la société mère. On gagne donc beaucoup à clarifier le sens de ce que doit faire chaque employé au quotidien.

Finalement, en lien avec le sujet de la conférence, voici une version sympathique de la courbe classique de réaction à un changement.

Votre organisation est-elle meilleure ou pire que vous le pensez?

Marco Poutré
Conseiller qualité – Mouvement québécois de la qualité

Notre conseiller qualité a ensuite enchaîné avec une conférence au cours de laquelle les participants ont pu répondre à douze questions inspirées du QUALImètre, l’outil de diagnostic organisationnel à la base de l’évaluation des candidatures pour les Prix performance Québec.

Derrière la formulation loufoque des choix multiples, on réussit tout de même à reconnaître les meilleurs des pires. Voici un exemple qui aide une organisation à se situer quant à la protection de ses données sensibles :

Est-ce que les données de l’organisation sont protégées relativement à leur sécurité et à leur confidentialité?

  • J’ai mis le nom de mes deux enfants comme mot de passe du serveur, personne ne se doute de rien.
  • On a confié cette mission à un sous-traitant, mais ne me demandez pas ce qu’ils ont fait, je connais rien en informatique.
  • Nous sommes conscients que les données de nos clients et notre savoir propriétaire sont une mine d’or et nous les protégeons en conséquence.
  • Les cinq plus grands pirates informatiques au monde fournis en café, Red Bull et jelly beans pendant un mois ne pourraient pénétrer notre réseau.

Gérer l’erreur humaine autrement pour améliorer votre performance

Sylvain Bricault
Directeur général – Domtar, usine de Windsor

Poursuivant sur la lancée qui lui a valu le prix or du jury au Salon sur les meilleures pratiques d’affaires en 2017, l’usine de Domtar à Windsor continue d’innover dans les façons dont elle traite les erreurs humaines, que plusieurs organisations voient comme des trous noirs, des angles morts ou des culs-de-sac.

Ayons d’abord en tête que, selon la NASA, l’humain commet en moyenne cinq erreurs à l’heure. Nous sommes faillibles, c’est un fait.

La bonne nouvelle est que la grande majorité de ces erreurs sont sans conséquence : faire une faute en tapant notre mot de passe, oublier notre tasse à café dans la salle des employés, etc. Il faut donc concentrer notre attention sur les erreurs ayant des conséquences graves.

L’organisation a un rôle important à jouer dans la prévention et le traitement de ces erreurs. Est-ce que cet encadrement va déresponsabiliser les employés, c’est-à-dire engendrer une réaction du style « ce n’est jamais de ma faute, c’est toujours de la faute de mon entreprise »? Pas du tout, puisque la démarche de Domtar ne tolère pas ce qu’il convient d’appeler les « violations téméraires aux normes établies ». Ces comportements non souhaités demeurent traités à l’aide de mesures disciplinaires.

Qu’aurait fait un autre travailleur ?

La question fondamentale au cœur de ce que Domtar appelle « l’arbre décisionnel de la culture juste » est la suivante :

« Connaissant le contexte au moment de l’incident, est-ce qu’un autre travailleur ayant le même niveau de formation aurait eu le même comportement/fait la même erreur? »

Tous les mots sont importants dans cette question. Elle met surtout en perspective le fait qu’un employé travaillant depuis 20 ans à la même opération ne doit pas être jugé sur la même base qu’un tout nouveau.

La question ci-dessus met aussi en lumière les lacunes liées à l’intégration des nouveaux employés, toujours en ce qui concerne les situations dans lesquelles la mauvaise décision peut entraîner des conséquences dramatiques.

C’est Sylvain Bricault lui-même qui forme les nouveaux employés sur la façon dont sont traitées les erreurs humaines chez Domtar. Il en profite pour leur parler de la « minute d’arrêt », un concept simple qui consiste à prendre une pause en cas de doute et à demander l’avis de ses collègues avant de poser un geste qui pourrait avoir des répercussions négatives. Le directeur général est clair là-dessus : il préfère expliquer un retard à un client plutôt que de vivre une situation dramatique résultant d’une pression sur la performance.

Le processus d’enquête suite à un incident a également été standardisé à tous types d’événement (SST, qualité, etc.) L’approche est tout simplement d’utiliser des questions ouvertes plutôt que fermées, ces dernières donnant l’impression à l’employé de subir un interrogatoire. « Avais-tu lu la procédure? » ne nous apprendra pas grand-chose alors que « raconte-moi ce qui s’est passé » ou « comment te sentais-tu au moment de prendre la décision ? » amène l’organisation plus loin en lui révélant les raisons profondes derrière ces fameuses erreurs humaines.

Formez vos employés pour continuer de croître

François Deschênes
Directeur formation – Premier Tech

L’entreprise Premier Tech s’est dotée d’une université, un terme qui n’est pas qu’une façon originale ou prétentieuse de qualifier la façon dont elle développe les compétences de ses employés.

En effet, tout, tout, tout ce qui gravite autour de la formation est réalisé à l’interne chez Premier Tech. Des experts en transmission du savoir prennent le temps de s’asseoir avec ceux de leurs clients internes qui ont besoin d’augmenter les connaissances d’une petite équipe ou même de l’organisation au grand complet.

L’entreprise a ainsi standardisé des moyens de formation tout en leur donnant des noms colorés :

  • Mini U – courte activité de cinq minutes qui prend habituellement la forme d’un jeu;
  • U Learning – autoformation d’une durée habituelle d’une heure;
  • U Live – formation par le partage d’expériences avec des pairs;
  • U Journey – parcours de développement qui peut s’échelonner sur trois à six mois, habituellement composé d’éléments provenant des autres moyens de formation. Un exemple de U Journey : « Au-delà de la technique, les compétences stratégiques », qui aide un gestionnaire récemment promu à parfaire les habiletés nécessaires dans son nouveau poste;
  • U Program – cohorte pouvant aller jusqu’à deux ans et servant à développer des employés pour un rôle spécifique.

L’équipe de l’université Premier Tech est impliquée du début à la fin, depuis l’uniformisation du vocabulaire utilisé dans le matériel jusqu’au retour sur les attentes, qui remplace ici le traditionnel retour sur l’investissement. En effet, dans le cas d’une formation, il convient de se fixer dès le départ des objectifs (qui ne sont pas toujours financiers) et de confirmer leur atteinte. Une telle validation est faite automatiquement vis un LMS (Learning Management System) jusqu’à six mois après la formation.

Plongez dans la numérisation de vos opérations pour optimiser votre gestion

Dave Grange
Vice-président aux opérations – Fruit d’Or

Nous avions déjà couvert une conférence de Stéphanie Chagnon qui expliquait comment un incendie ayant détruit l’usine de Notre-Dame-de-Lourdes avait permis à Fruit d’Or de repenser ses opérations avec le 4.0 en tête.

C’est tout en humilité que Dave Grange est revenu sur cet événement et sur les progrès accomplis depuis. Avec réalisme et nuances, il a présenté cette transformation comme une succession de projets dans lesquels l’entreprise doit trouver un équilibre entre le positionnement stratégique, la mise en place de prérequis et bien entendu, le retour sur l’investissement.

Les quatre étapes vers la maturité 4.0

  • Voir ce qui se passe – Transformer les données en information.
  • Comprendre pourquoi ça se passe – Transformer l’information en connaissance.
  • Prédire ce qui se passera – Passer de la compréhension à la prévision.
  • S’adapter de manière autonome – Passer de la prévision à la prise d’action automatique.

Et on ne répétera jamais assez les bénéfices de la numérisation sur la main-d’œuvre. Le bon projet vous permettra peut-être d’éliminer le poste que vous tentez de combler depuis des mois et de bonifier ceux qui demeureront affichés sur les sites de recrutement, les rendant plus attrayants pour des candidats à la recherche de défis ou d’une organisation qui prend son avenir au sérieux.

Le premier d’une longue série?

L’événement fut pertinent du début à la fin. Il était très rafraîchissant de côtoyer des gens qui parlent notre langage et partagent la même passion que nous! Chaque participant, chaque conférencier et chaque partenaire étaient des ambassadeurs de l’excellence opérationnelle. La salle était remplie et il ne reste qu’à espérer que le groupe Les Affaires récidivera avec une deuxième édition!

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